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Sommet mondial sur la société de l'information
PrepCom1 - Genève, 1-5 juillet 2002

Recommandations d'IRIS pour la participation des ONG

La légitimité de la participation des organisations non gouvernementales (ONG) est multiforme. Une participation active et équitable des ONG est souhaitable en raison des principes de légitimité spécifiques dont elles peuvent se prévaloir : expertise, connaissance du terrain, rôle d'interface et de sensibilisation auprès du public, défense de principes « d'intérêt général », etc. IRIS propose dans ce document des principes de base, puis des modalités concrètes de leur mise en oeuvre, pour une participation active et équitable des ONG au SMSI.

I. Principes de base

La participation des ONG doit au minimum reposer sur les conditions suivantes :

1/ La procédure d'accréditation doit être remplacée par une simple inscription.
L'inscription des ONG au SMSI doit être acceptée de manière automatique, c'est à dire sans accord préalable des Etats ou de toute autre entité. C'est pourquoi la notion d'« accréditation » doit être remplacée par celle d'« inscription ». Dans le cas où un Etat ou toute autre entité demanderaient l'exclusion d'une ONG, ils devront très clairement expliquer les raisons de leur demande qui sera ou non acceptée par les autres ONG selon des motifs dûment circonstanciés.

2/ Une transparence totale doit être garantie en matière d'accès à l'information.
Les conditions d'accès et de diffusion des documents relatifs au SMSI doivent être clairement définies par l'adoption de directives explicites et précises, en collaboration étroite et avec l'accord explicite des ONG. Celles-ci doivent notamment stipuler que toutes les informations relatives au SMSI doivent être rendues publiques, sauf cas exceptionnel dûment justifié.

3/ A l'exclusion du droit de vote, la participation des ONG doit être maximale.
La participation active des ONG doit se traduire par une implication directe dans la définition des enjeux, la formulation de propositions et le contrôle de l'application des décisions. Cette participation ne doit en revanche en aucun cas être motivée par une quelconque tentative de leur part d'affaiblissement des prérogatives et de la responsabilité des Etats à leur profit, et a fortiori celui du secteur privé. C'est pourquoi la « société civile » ainsi que le secteur privé ne doivent bénéficier d'aucun pouvoir formel en matière de prise de décision.

4/ La responsabilité d'endosser les résultats relève de l'accord explicite des ONG.
L'absence de pouvoir formel en matière de prise de décision doit permettre en retour aux participants de la société civile de ne pas être obligés d'endosser officiellement la déclaration de principe et le plan d'action du SMSI, qui doivent relever en dernière instance de la responsabilité unique des Etats, seuls formellement légitimes à s'exprimer au nom de leur population et responsables devant elle.

5/ Toute idée de « représentativité de la société civile » doit impérativement être bannie.
Dans la mesure où les participants de la société civile ne peuvent en aucun cas se prévaloir d'une quelconque légitimité en termes de représentation, le recours à l'expression « représentant de la société civile » doit impérativement être bannie. C'est pourquoi on lui préférera à titre d'exemple celles de « participants de la société civile », de « membres de la société civile », ou encore d'« acteurs de la société civile ».

6/ L'intérêt général doit prévaloir au détriment des intérêts particuliers du secteur privé.
Si la participation du « secteur privé » au SMSI ne va pas nécessairement de soi, elle doit en tout état de cause être accompagnée de la prise en compte de la célèbre mise en garde d'Adam Smith à son sujet : « La proposition de toute nouvelle loi ou règlement de commerce qui part de cet ordre [les marchands et les manufacturiers] doit toujours être écoutée avec beaucoup de précaution, elle vient d'un ordre d'hommes dont l'intérêt n'est jamais exactement le même que celui du public, et qui, dans bien des occasions, n'a pas manqué de le tromper et de l'opprimer ».

II. Modalités concrètes de mise en oeuvre

L'inscription au SMSI doit automatiquement donner la possibilité aux ONG de :

1/ Définir elles-mêmes les contours de leur groupe et les critères requis pour en faire partie. A titre d'exemples, elles pourront exclure les organisations à but non lucratif représentant explicitement les intérêts du « secteur privé » ainsi que les organisations à but non lucratif qui militent pour des valeurs qu'elles jugeront contraire à la déclaration universelle des droits de l'homme ;

2/ Etre systématiquement informées du calendrier, de l'ordre du jour, du déroulement et du contenu de toutes les réunions, plénières et spécialisées, formelles et informelles, de concertation et de négociation ;

3/ Recevoir toute la documentation relative au SMSI avant, pendant et après les réunions, en quantité suffisante, dans l'une des langues officielles de leur choix et dans un format non propriétaire pour la diffusion électronique ;

4/ Désigner elles-mêmes des membres en son sein pour participer activement et sur un pied d'égalité avec les Etats à toutes les réunions, plénières et spécialisées, formelles et informelles, de concertation et de négociation ;

5/ Prononcer des allocutions et diffuser des documents écrits dans l'une des langues officielles de leur choix en bénéficiant automatiquement des services de traduction et de diffusion du SMSI dans toutes les réunions, plénières et spécialisées, formelles et informelles, de concertation et de négociation ;

6/ Présider et co-présider lesdites réunions et autres groupes de travail ;

7/ Proposer des amendements, sans pour autant disposer d'un droit de vote qui doit rester la prérogative des Etats responsables en dernière instance des résultats du SMSI ;

8/ Refuser la responsabilité d'endosser officiellement la déclaration officielle et le plan d'action du SMSI dans l'éventualité qui ne peut être ignorée où ces textes devaient ne pas correspondre à un compromis acceptable à leurs yeux et ce, malgré les efforts accomplis par les uns et les autres pour aboutir à un consensus ;

9/ Bénéficier d'un soutien financier direct attribué selon des règles transparentes par le Secrétariat exécutif du SMSI en priorité aux associations des pays du sud et de terrain, leur permettant ainsi de pouvoir participer dans les mêmes conditions que les autres associations. Un fond de soutien financier obligatoirement alimenté par les Etats du « Nord » et les entreprises privées au prorata de leur budget respectif, doit être créé à cet effet par le Secrétariat et fonctionner selon des règles de procédure transparentes.

Annexe : présentation d'IRIS

IRIS (Imaginons un réseau Internet solidaire) est une ONG française à but non lucratif créée en octobre 1997. L'objet d'IRIS est la défense des libertés individuelles et des libertés publiques sur Internet, la promotion de l'accès à Internet en tant que service public, et la promotion des usages non marchands du réseau.
En France, IRIS est membre de l'intercollectif DELIS (Droits et libertés face à l'informatisation de la société : www.delis.sgdg.org), et du R@S (Réseau associatif et syndical : www.ras.eu.org). A l'échelle européenne, IRIS est membre fondateur de la fédération EDRi (European Digital Rights : www.edri.org). Au plan international, IRIS est membre de la coalition GILC (Global Internet Liberty Campaign : www.gilc.org).
L'association est active aux plans national (auditions et consultations institutionnelles, sensibilisation du milieu associatif et syndical aux enjeux politique et sociaux d'Internet, publication de rapports et analyses, conférences et débats,...), européen (groupes de travail de la Commission européenne sur les contenus illégaux et offensants sur Internet et sur la cybercriminalité) et international (interventions auprès du Conseil de l'Europe et de l'Unesco, notamment dans le cadre de la coalition GILC, etc.). Pour plus de renseignements, voir le site d'IRIS : www.iris.sgdg.org.

(dernière mise à jour le 18/12/2004) - webmestre@iris.sgdg.org